lundi, février 06, 2006

La mort de Jean Irigoin, helléniste

J'ai appris la mort de Jean Irigoin aujourd'hui par un article du journal Le Monde de la semaine dernière. C'était l'incarnation même de l'helléniste érudit. Membre de l'Institut et professeur honoraire au Collège de France, Jean Irigoin est mort samedi 28 janvier à Paris. Il était âgé de 85 ans.

J'ai acheté et lu ces dernières parutions sans toujours tout comprendre mais assurément impressionné par une telle érudition. C'est Jean Irigoin qui m'a donné la passion de mieux comprendre les mécanismes de transmission des textes de l'antiquité jusqu'à nous.

Né le 8 novembre 1920 à Aix-en-Provence, Jean Irigoin avait commencé sa carrière d'enseignant au lycée d'Aix, avant de gagner Berlin, alors en plein désordre, comme chef de la section culturelle du groupe français du conseil de contrôle de la ville (1946-1948). Il devait du reste conserver de solides liens avec le monde allemand puisqu'il fut en 1952-1953 chargé de cours à l'université d'Hambourg, dans la toute jeune RFA.


D'une indépendance d'esprit qui ne se démentira pas, Jean Irigoin ne suit pas la voie royale de ses confrères, mais opte pour le CNRS tout en finissant sa thèse (Histoire du texte de Pindare, 1952), collabore au Thesaurus Linguae Graecae et intègre l'université de Poitiers, où il est successivement maître de conférences (1953), puis professeur de langue et littérature grecques (1956), tout en donnant deux thèses complémentaires, Recherches sur les mètres de la lyrique chorale grecque (1953) et Les Scholies métriques de Pindare (1958).

En 1965, Jean Irigoin intègre Paris-X Nanterre pour y enseigner la philologie grecque, tout en assurant une direction d'études à l'Ecole pratique des hautes études qu'il conserve jusqu'en 1992. Entre-temps, il obtient une chaire en Sorbonne (1972), puis celle de "tradition et critique des textes grecs" au Collège de France (1985-1992).

Membre ou correspondant de nombreuses académies étrangères, il a surtout assuré la direction, pendant plus de trente ans, de la prestigieuse série grecque de la Collection des universités de France, la "Budé" pour les étudiants, dont 236 volumes parurent durant son mandat, entre 1964 et 1999. C'est chez le même éditeur qu'on peut trouver deux recueils de ses travaux, Tradition et critique des textes grecs (1997) et La Tradition des textes grecs. Pour une critique historique (2003), qui offrent autant d'admirables leçons de philologie par l'exemple. Son oeuvre fit progresser de façon considérable la mise au point des textes qu'il étudiait, campant une sorte de détective qui ne lâchait pas la piste empruntée tant qu'il n'avait pas pu établir la juste leçon philologique.

Sa mort m'émeut plus qu'il ne devrait...émotion devant la perte d'un grand esprit.

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