mercredi, novembre 15, 2006

Le Louvre aux Émirats arabes unis...

Bon! Le journal parisien Libération révèlait samedi des négociations très avancées en vue de la création d'un musée Louvre à Abou Dhabi...et pourquoi pas?

C'est un projet que Chirac appuie semble-t-il et je ne vois pas pourquoi la France ne pourrait pas exporter (intelligemment bien-sûr) une de ses grandes richesses, malgré certaines réticenses toutes françaises. Malgré le titre négatif du quotidien français, ce projet ne consiste pas à la "vente" du Louvres mais plutôt à une vitrine dans un des endroits les plus riches du monde... A&M

Une délégation part poser les bases du projet de musée aux Emirats arabes unis. La France impatiente de vendre le Louvre à Abou Dhabi

Par Nathalie BENSAHE
Libération (samedi 11 novembre 2006)

Et si la France n'attendait pas Noël pour conclure le contrat le plus inédit et le plus controversé de l'histoire de la politique culturelle française, celui de la création d'un musée du Louvre à Abou Dhabi ? Cette affaire ultradiplomatique, qui relevait depuis plus d'un an de discussions d'Etat à Etat, prend depuis quelques semaines une tournure beaucoup plus concrète. La semaine prochaine, une délégation composée de représentants du Louvre, du centre Georges-Pompidou et du musée du Quai-Branly partira à Abou Dhabi afin d'engager les premiers travaux de réflexion sur la réalisation de ce gigantesque chantier de 30 000 à 40 000 m2 ( Libération du 5 octobre)

Accompagnée de la directrice des musées de France, Francine Mariani-Ducray, cette équipée doit entreprendre une négociation précise sur les termes de la commande émirienne : la conception, la construction et l'organisation muséographique d'un Louvre sur les sables du richissime petit émirat de 700 000 habitants. Un musée généraliste labellisé par le premier des musées français, qui réunira aussi l'expertise des quatre autres grands établissements nationaux, Beaubourg, les Arts premiers, Orsay et le château de Versailles. «Nous entrons enfin dans une discussion sur le fond», dit-on au ministère de la Culture. «Il s'agit d'aborder des questions aussi pointues que la surface exacte du musée, les conditions d'utilisation du label Louvre, la durée précise des engagements français en matière de conception scientifique et artistique. Il faut aussi définir les contours de la structure indépendante qui mènera le projet et sera financée par les émirats. Et encore déterminer les rythmes d'expositions internationales sur une période d'au moins dix ans.» Enfin, la délégation va devoir négocier âprement la durée du prêt des oeuvres : celles qui viendront du Louvre, mais aussi celles des autres grands musées. A priori, la France souhaiterait que la durée des prêts ne dépasse pas trois ans... Qu'en penseront les Emiriens ? Après tout, on n'exporte pas un musée comme on vend des Airbus.

Paris-IV - Abou Dhabi. «Nous connaîtrons très vite les exigences émiriennes, parce que le calendrier s'accélère», explique un négociateur. Après le tour de piste de la délégation française, c'est le ministre de l'Education nationale, Gilles de Robien, qui se rendra dans l'émirat du 16 au 18 novembre, pour l'inauguration de la Sorbonne-Abou Dhabi... vendue à l'émirat l'an dernier. Il en profitera pour faire avancer la cause du Louvre. «Paris-IV -Abou Dhabi, qui délivre des enseignements en français, pourrait bien servir d'aiguillon à des formations spécifiques aux métiers de l'art», dit-on au ministère de la Culture. Enfin, dans la foulée, le ministre de la Culture compte bien faire le voyage jusque dans les Emirats arabes unis pour boucler ce mégacontrat évalué entre 750 millions et 1 milliard d'euros.

Que s'est-il passé depuis le début de l'automne pour que ce projet a priori très improbable entre dans le champ des possibles ? Un échange de lettres entre Renaud Donnedieu de Vabres et le cheikh Tahnoon al-Nayan, frère du prince héritier de l'émirat et responsable de l'Autorité touristique d'Abou Dhabi, donne maintenant aux Français toutes les raisons d'espérer. «La réponse du cheikh Tahnoon au ministre est bien plus qu'un signal, c'est une déclaration d'intention», dit un diplomate français. Voilà pourquoi la partie française met désormais les bouchées doubles pour que ce projet pharaonique ne lui échappe pas. «Les autorités d'Abou Dhabi veulent une conclusion rapide et c'est un paramètre qu'il ne faut pas négliger», expliquait-on récemment à l'Elysée. «Dans ces affaires, il ne faut pas traîner», s'agace un diplomate : «En un an, la Fondation Guggenheim a vendu un musée Guggenheim d'art contemporain à Abou Dhabi pour 400 millions de dollars. Si nous ne réalisons pas rapidement ce Louvre dans l'émirat, d'autres grands musées ­ notamment l'Ermitage de Saint-Pétersbourg ­ sont prêts à le faire.»

Résultat : au cours de ces dernières semaines, la direction des Musées de France et le ministère de la Culture ont concentré leurs efforts pour mobiliser tous les acteurs de ce dossier. A commencer par le Louvre, à qui le gouvernement demande tout simplement de fournir un mégamusée hors les murs. Pourtant, depuis le début de cette affaire, Henri Loyrette, le président du musée national, répugne à céder la marque Louvre aux Emiriens, mais aussi à se retrouver chef de file d'un projet dont il a le sentiment qu'il ne contrôlera pas grand-chose... Et, pourtant, s'il a beaucoup résisté, l'homme a, semble-t-il, modifié sa position. Face à l'exigence de l'Etat français, le patron du Louvre a-t-il le choix ? Mieux vaut peut-être négocier un certain nombre de garanties. «Le Louvre s'est montré plus souple, parce que nous avons pris en compte leurs inquiétudes et leurs craintes», raconte une source proche du ministère de la Culture.

La délégation française a compris qu'elle avait sans aucun doute une obligation de résultat : revenir de son voyage avec un avant-projet de réalisation du Louvre-Abou Dhabi et faire de «ce partenaire économique privilégié très cher à Jacques Chirac» ­ comme on le dit à l'Elysée ­ le centre culturel des monarchies du golfe Persique. Question : le Français Jean Nouvel sera-t-il l'architecte de ce nouvel établissement ? La délégation devra ramener la réponse.

Source: Libération

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